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ESPACE, ASPECTS PSYCHOLOGIQUE ET ANTHROPOLOGIQUE Farid CHOUKRI - MAROC Publications de la faculté des lettres N° 31 Série: Etudes et Monographes N°9 - 2000 |
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L’espace enveloppe l’être. C’est l’inclusion dans l’être de l’environnement qui lui appartient et le contient ou avec lequel il se sent entretenir des liens. L’imaginaire de la transformation y est fort présent. En passant d’un espace à un autre, la personne assure la continuité d’un corps vécu qu’il puisait dans sa propre pensée. C’est l’ensemble des représentations psychiques qui entourent un sujet à un moment donné qui fonde la relation au monde. Un monde fait d’espaces de significations et des lieux à habiter, à transformer ou à imaginer. L’exploration de l’espace englobe un processus complexe et dynamique faisant intervenir des fonctions cognitives, physiques, psychoaffectives et imaginatives qui entrent continuellement en interaction dans des mouvements d’attachement et de détachement, d’éloignement et de rapprochement, de rejet et de ré appropriation, d’investissement et de désinvestissement. Ce qui crée un autre espace -d’échange- entre le sujet et l’espace. Entre le dedans et le dehors. L’espace ne peut être vide sinon il devient source de l’angoisse. Angoisse d’un contenant défaillant à accueillir un contenu. Il ne peut y avoir d’inscription dans un espace si celui ci n’est pas investi comme lieu possible d’accueil et de transformation. La mise en forme de la cognition nécessite à tout instant la possibilité d’une forme contenant dans laquelle la pensée de l’individu puisse être projetée puis ramenée à lui. Il y a toujours une projection d’une profondeur dans l’espace, voir une fusion des deux pour former un tout. La pensée de l’être est projetée sur le support que cet être a choisi de constituer en espace récepteur. L’enfant n’appréhende t-il pas, imaginaire ment sa globalité corporelle grâce à la perception de lui-même dans le miroir avant de réaliser son unité perceptive. ( Stade de miroir ). La culture n’est pas étrangère a ces processus et parmi ses fonctions celle qui offre à l’individu une conceptualisation de la délimitation entre le dedans et le dehors. « Nous sommes des Imazighen ( berbères ) et non des apaches. » Espace culturel / Autre espace culturel. Mais à l’intérieur même d’une culture, il existe toute une série de couples conceptuels antagonistes. P. ex. Amazirophones-Arabophones. Plus, chaque culture développe, en son sein, des modèles d’ordre psychique qui lui sont spécifiques. Le statut "ceux du trésor" « Rkenz » était très élaboré chez les Soussis connus par leur esprit d’entreprise qui s’opposait à l’idéal guerrier des Rifains, "ceux de la fierté", n « Râaz» ; de même que le statut que j’appellerais volontier "ceux de l'art"« Rfen », chez les Chleuhs de l’Atlas connu par leurs merveilleuses productions musicales, sans égal. Les échanges entre l’homme et le monde passent par les médiations du corps propre. Un corps qui se définit comme une puissance qui est en mesure de transformer l’espace réel en un espace imaginaire. Le thème de l’espace, élaboré dans les rêves, est très riche puisque c’est tout l’espace onirique qui dérive du vécu corporel. Le corps devient dans le rêve tout l’espace environnant ainsi que les perceptions dont il se remplit. L’espace imaginaire du rêve est élaboré symboliquement en fonction du désir qui seul peut faire le tri. Le corps propre et le monde des choses forment un tout et les caractéristiques spatiales de l’un et de l’autre sont indissolublement liées. « L’espace se ramène à son origine corporelle et le corps à son essence corporelle. » Dans la névrose d’angoisse le corps imprime à l’espace environnant ses propres dimensions. Il s’effectue une expansion démesurée de l’espace corporel qui finit par coïncider avec tout l’espace. Cela se passe comme s’il n’y avait pas de support pour contenir le corps effondré, une sorte de chute, en spirale, dans un trou noir. On retrouve dans toutes les névroses et aussi dans la psychose, à des degrés variables, une symbolique particulière de l’espace avec cette même image de possession par l’espace malgré que l’angoisse se localise «volontiers » à l’un ou l’autre des deux pôles intérieur / extérieur. Dans l’agoraphobie c’est le dehors qui se trouve agressivement investi. Il est identifié à un vide doué d’un pouvoir de destruction par aspiration alors que l’intérieur est sécurisant. Et plus la distance qui sépare l’agoraphobe de son centre de refuge ( son point de référence ), plus l’angoisse est intense. Dans la claustrophobie, le rapport des forces entre le dedans et le dehors s’inverse. L’angoisse devient liée à l’espace fermé. Le claustrophobe appréhende d’être écrasé ou comprimé entre les parois de l’ascenseur. Piégé dans la cabine lors d’une panne entre deux étages . Plus l’étage prend de l’altitude, plus la crainte est marquée. Etouffé lorsque les portes de l’avion se referment pour le décollage ou se trouver dans le vide si jamais les réacteurs s’arrêtent. Ou tout simplement oppressé lorsque les fenêtres et la porte d’une chambre sont fermées. Cela se passe comme si l’espace se rétrécie, devenait clos et écrase. L’air se comprime, devient rare et étouffe. L’espace, ainsi fermé, rend le mouvement malaisé, ne permettant que le déplacement que pour mieux l’annuler. Le limité devient identique à l’illimité. Dans la psychose il y a une perte de contact vital avec la réalité. Le psychotique délimite plus ou moins un dedans et tend à refaire une enveloppe. Mais c’est plus un réaménagement des rapports du sujet et du monde extérieur qu’une rupture totale et définitive de l’appréhension des données du réel. L’angoisse provoquée par le dehors éparpillé en fragments projetés réalise une restauration narcissique susceptible d’annuler cette angoisse. Il organise un espace psychique contenant dans lequel se développe son délire personnel. Il fait de cet espace le théâtre des déplacements de ses pensées. Il les apprivoise par les différents mécanismes hallucinatoires selon le type de la psychose. La réalité est ainsi altérée et le psychotique s’aliène dans un espace labyrinthique de fantasmes. Il dénature le monde et le rend plus loin par un contact fusionnel. Le vécu devient intemporel dans un espace dont l’accès est apparemment inabordable. Quel est l'espace thérapeutique que notre société réserve t-elle aux malades mentaux ? Un vaste espace où se mêlent, dans les pratiques quotidiennes, l’animisme, la magie, la superstition, les phénomènes pseudo religieux… et la médecine. Des formules magico-religieuses, des écritures des fqihs, des pratiques d’incantation et d’exorcisme, des brûlures dans des parties du corps(Thiqqad)… sont préconisées et censées apporter des remèdes. Car selon un « besoin de croyances », le malade quand il souffre c’est qu’il est possédé, habité, frappé par des esprits qui révèlent leurs effets maléfiques, qu’il est agressé par des sentiments négatifs d’un tiers portés sur lui( mauvais œil, sorcellerie) ou qu’il est soumis tout simplement au destin inéluctable(autre irrationalité). Ces effets se manifestent, par exemple, à travers la crise d’hystérie, la convulsion de l’épileptique, le délire du psychotique, la jaunisse du cirrhotique ou d’un abdomen aigu. Les confréries, les marabouts et les autres ont produit une conception de la maladie et de la folie en rapport avec les phénomènes occultes et superstitieux. Les saints dont on voit les coupoles blanches partout en Afrique du Nord ont, eux aussi, les fonctions de guérir et de protéger. Leurs réalités mythique et historique dans la plus part des cas sont insaisissables. Certes le culte des saints est un phénomène universel, mais il est particulièrement amazigh(berbère), c’est à dire Nord Africain depuis l’aube du temps. Il n’a fait qu’adopter, successivement, les couleurs des trois religions monothéistes. Sa nature parareligieuse et hérétique est gardée. Mais c’est la fonction sociale du culte qui importe le plus. En général ces sains sont des personnages locaux. Ils ont un territoire délimité. Chaque localité ayant tenu à avoir un patron distingué par une légende qui rivalisait par son contenu merveilleux. Chaque coupole devient un centre, petit ou important, de pèlerinage et de visite à but thérapeutique ou préventif. Jadis on se disputait les corps des saints. Il y en a ceux qui ont deux tombes ou parfois plusieurs dans des lieux différents et très éloignés les unes des autres. Parfois on a monté des coupoles sur des sites ayant étés, tout simplement, visités par ces prétendus saints. Le Marabout peut désigner à la fois le saint vivant, le saint enterré, sa tombe, et même des objets comme les pierres, les sources, les puits, les grottes, les arbres ou les animaux sacrés. Mais c’est toujours l’espace qui assure la continuité du sacré. Un saint musulman a pu succéder à un personnage sacré antérieur, juif, chrétien ou païen. Un même mausolée peut abriter un saint de l’une ou l’autre confession. Un lieu sacré préhistorique, grotte, rocher, mont ou source s’est souvent perpétré à travers les différentes religions qui ont succédé à travers les âges. Le but essentiel d’avoir à ses cotés ces lieux de culte investi de sacré ou de leur rendre visite est le soulagement de l’angoisse. Le marabout est un lieu de rencontre. On s’y soigne, on y court à la moindre altération de son état surtout lorsqu’on est femme, on y sacrifie des bêtes... Certains saints sont réputés comme ayant un pouvoir particulier sur telle ou telle affection. L’exemple de Bouya Omar est très démonstratif en ce qui concerne le traitement des maladies mentales. Avec Bouya Omar on est devant une référence mythique très structurée. Un vrai culte qui s’inscrit dans une ligne de croyances gérées, pour un éventuel soulagement, par des procédés judiciaires curieux instaurés par le maître du lieu pour déposséder le malade de l’esprit provocateur des troubles. Bouya Omar, non loin de Marrakech, est un rassemblement de quelques bâtiments d’habitations et d’une colonie de tentes, avec au centre le sanctuaire lui-même. Après avoir appliquer à la lettre des consignes tels que l’arrêt de tabac, la suspension des médicaments, le rejet des talismans, le « possédé » passe au sanctuaire où il doit recevoir un ensemble de rituels à viser thérapeutique. Dans ce premier lieu il n’y a ni couleur, ni musique, ni danse. Sur le toit il n’y a qu’une coupole blanchâtre à la chaux. Dans le mur de la façade, qui donne sur la cour où s’organise la hadra, s’ouvre une fenêtre où sont accrochés des cadenas destinés à « nouer l’intention du saint ». Dans le sanctuaire il est reçu par le fqih qui le met entre les mains de Moul Addine. Celui ci l’assoit sur le bord de la fenêtre. Il l’attache avec une chaîne à miracle. En suivant certaines pratiques et rites ésotériques il fait manifester l’esprit. C’est sur cette fenêtre que se réalise le jugement du malade et de l’esprit. Si le malade est très agité ou violent, on lui lie les mains et si nécessaire les pieds afin d’empêcher l’esprit de faire le moindre mouvement et de mettre fin à sa brutalité. On lui fait ensuite accomplir trois fois le tour du tombeau avec la chaîne au cou. Selon l’importance de l’esprit et selon l’agression, on demande un petit sacrifice (poulet) ou un grand sacrifice ( bouc ou mouton). On lui fait exécuter de nouveau les trois tours du tombeau avec soit le petit sacrifice à la main, soit le grand sacrifice sur les épaules. Si l’animal bêle ou la volaille pousse des cocoricos, c’est que l’esprit est saisi par le tribunal. Les femmes, alors, poussent des cris de joies. Le fqih fait saigner l’animal et marque avec le sang les parties du corps du malade censées être les plus propices pour le logement de l’esprit. Le malade doit attendre trois jours avec les marques tout en subissant plusieurs purificatoires. Les rêves du malade, de sa famille, de ses voisins ou des « chorfas » doivent attirer toute l’attention car ce sont ces rêves qui doivent orienter le malade vers la voix de la guérison. Le rêve constitue l’expression privilégiée de toutes les manifestations du culte. Selon le jugement de Moul Addin, le patient est entraîné dans "rhaddarth"(la transe), prié de rentrer chez lui et d’attendre une autre manifestation onirique, ou orienté carrément vers d’autre thérapeutique s’il estime que sa maladie ne relève pas de la possession. Le malade ne peut quitter l’espace Bouya Omar sans la permission du saint. Il est incarcéré dans un but thérapeutique tant que les tentatives de guérison se sont avérées inefficaces. Le malade, ainsi que sa famille, qui arrivent au sanctuaire ne savent pas, au départ, ce que réserve l’avenir à l’intéressé. Tant que la guérison se fait attendre, la détention s’impose. Les manifestations oniriques et les symptômes psychosomatiques sont les signes caractéristiques de « l’incarcération thérapeutique » qui dépend de l’autorité du saint. Les malades et leurs familles qui se rendent à Bouya Omar sont plus ou moins avertis et donc préparés à subir le poids d’une éventuelle détention. La durée de cette dernière peut aller de quelques jours à plusieurs années. Cependant l’espace entier est imprégné de l’espoir de guérison. En attendant la délivrance, le malade organise sa vie dans la zaouia selon ses moyens, ses capacités physiques et ses facultés mentales. Quand le malade n’a pas les moyens de subsistance, il peut se donner à de petits travaux de manœuvre au marchant ambulant de bougies, d’œufs, de Hennie, de chaînes ou de porteur d’eau. Il peut s’occuper d’une cabane (boutique) à titre de salarié ou de gérant. Il peut s’occuper également des nouveaux malades contre un salaire en lui assurant une surveillance et un maintien de rituels. Il y a aussi la possibilité à ce qu’il effectue des travaux rémunérés dans des champs avoisinant qui appartiennent aux « chorfa ». Le malade circule librement dans l’espace de la zaouïa. Dans cet espace on trouve aussi de véritables abandonnés qui se livrent à la mendicité et à la clochardisation. La délivrance, qui peut être provisoire ou définitive, est souvent communiquée au malade par la visite du saint en rêve, par son propre rêve ou celui d’une autre personne. Pour protéger cette grâce, l’intéressé, en rentrant ou en arrivant chez lui, est soumis à un isolement afin d’éviter tout contact physique susceptible de briser le jugement. La durée de cet isolement, communiqué à la délivrance, est de trois, sept ou quarante jours durant laquelle le patient est soumis à des restrictions draconiennes. Dans les trois jours qui suivent la période de l’isolement, le sujet doit se rendre à Bouya Omar pour un pèlerinage de reconnaissance. Qui sera suivi, au moins, de pèlerinages annuels pendant les maoussem de Bouya Omar. En cas de délaissement le malade s’expose au châtiment ou risque une récidive de la folie. Quant à la psychiatrie, médecine spécialisée dans les maladies mentales, s’elle est raisonnablement développée dans les pays avancés, au Maroc elle reste pauvre et reflète notre société. Ce qu’elle offre essentiellement ce sont des consultations surtout dans le secteur privé où la relation medecin-malade est dominée par une négociation d’ordonnance de médicaments chimiothérapeuthiques. Les centres spécialisés se réservent les malades agités et agressifs. Par faute de moyens, on ne peut que constater un entassement des malades mentaux dans des hôpitaux isolés, une anarchie des règles de ses institutions, l’insuffisance en nombre et en qualité du personnel soignant. Les sociothérapies, formes d’activités de groupes organisés pour les malades dans un but thérapeutique d’occupation, de réadaptation au travail, de traitement par le travail(ergothérapie), d’activités culturelles, de musicothérapies, d’exercices physiques… sont d’une carence frappante dans nos institutions psychiatriques. -Curieusement et par la nécessité des choses, on a vu qu’à Bouya Omar il y a des entreprises similaires dans l’orientation des malades vers la guérison qui fonctionnent-. Mais grâce à la bienveillance de certains médecins, le patient quitte ces espaces d’aliénation, le plus souvent, soulagé de son angoisse mais fort bien imprégné d’une chimiothérapie lourde. Les autres formes de traitements psychologiques, individuelles (psychanalyse, comportementales, hypnose, de relaxation...) ou collectives (psychothérapies de groupes, familiales…) sont, au Maroc dans un stade embryonnaire. Partout dans le monde, la magie et la superstition sont plus répandues qu’on ne pourrait le croire. L’homme d’aujourd’hui a encore plusieurs moyens de s’y livrer. La « pensée primitive » apparaît chez lui que se soit dans sa vie privée ou dans ses fonctions sociales. Elle se juxtapose, dans l’espace psychique, à la pensée rationnelle. Il suffit de certaines situations particulières ou déclenchantes d’angoisse pour que l’on assiste à de véritables échanges psychiques qui ne sont que d’éveils de penchants. Un individu a beau être intelligent, intellectuel et adapté à toutes les exigences rationnelles de la vie et en même temps, croit ou pratique les charmes magiques dans des occasions particulières : jeux du hasard, roulettes, loteries, horoscopes, sorcelleries, magnétismes, tarot, talismans, esprits, êtres démoniaques, séances de spiritisme, voyantes, médiums, désenvoûteurs, etc. La magie n’est pas un état psychique anormal. Elle fait partie des possibilités d’expérience de tout être humain. Il y a une participation à l’expérience qui doit être comprise non pas au sens d’une signification illusoire, mais comme d’une part prise par tous les membres d’une société culturelle. La « pensée magique » canalise les anxiétés de l’individu et de la communauté. C’est une nécessité sociale qui est là où il y a absence d’institutions suffisantes et susceptibles de mieux canaliser les tensions individuelles et de protéger contres les différents troubles. Les sociétés nord africaines, dans l’espace du Tiers Monde, auront tendance à se primatiser et à replier sur les structures traditionnelles. Ce recours n’est pas sans comporter des dangers indéniables. La raison et les connaissances scientifiques ont bien leur limites dans un espace et dans une époque donnée. L’espace thérapeutique, avec toutes ses méthodes et ces courants qui se balancent entre le surnaturel et le rationnel, est appelé continuellement à être dépassé lorsque l’on serait avancé et aurait appris à mieux combattre l’ignorance et les craintes qu’on a vis-à-vis de la nature.
BIBLIOGRAPHIE DERMENGHEM E. (1954), culte des saints dans l'islam maghrébin, Paris, Gallimard EL KAHAYAT Gh. (1994), une psychiatrie moderne pour la Maghreb, Paris, L'Harmattan NAAMOUNI, Kh. (1995), le culte de Bouya Omar, Eddif NATHAN T. (1986), la folie des autres, Paris, Dunod SAMI A. (1986), l'espae imaginaire, Paris, Gallimard TISSERON S. (1996), le bonheur dans l'image, Coll. "les empêcheurs de penser en rond"
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