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Le monde a changé depuis le 11 septembre 2001 Docteur Rita El Khayat
Casablanca, 2 décembre 2001
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J’ai eu la
surprise indescriptible de regarder en direct les attentats grâce au décalage
horaire et j’ai vu en direct non seulement le deuxième immeuble des deux
tours se faire encastrer par le deuxième avion mais une heure ou un peu plus
après, la chute des deux constructions, dans des images d’apocalypse. Je ne suis pas
allée travailler ce jour-là et j’ai passé des heures à réfléchir et à méditer
devant ces scènes depuis Casablanca ; j’étais envahie par des émotions, des
sentiments et des idées aussi nombreuses que contradictoires et prégnantes. L’incroyable et
l’inattendu s’était produit sous les yeux du monde entier, ahuri, stupéfait
ou content, bouleversé ou traumatisé. Pour avoir pris
bien longtemps auparavant un déjeuner au sommet de l’une des tours, j’étais
dans un connu qui me donna fort à penser. Dans les explications offertes aux
visiteurs, il était décrit comment les deux tours oscillaient, chacune sur
son axe, d’un mètre par jour pour tenir l’équilibre de ce colossal ensemble
architectural, le plus en vue dans le monde. J’avais, par ce jour de beau
temps, éprouvé des sensations vertigineuses dans le ciel, ivresse à être dans
une réalisation aussi extraordinaire, hommage à ce que l’habilité humaine
peut arriver à faire. Vertige et
aussi émotion devant le nombre de morts en accident du travail ; je ne
perdais pas de mémoire cette fonction aussi admirable de l’humain à sa tâche
livré pour réaliser ce qui est la gloire et la fierté de tous les autres
hommes. Je me souvenais que c’était les Indiens américains qui sautaient
comme des chats en montant les structures métalliques de plus en plus haut en
vissant des milliers et de milliards de vis pour arriver à cette hauteur
absolument extraordinaire au-dessus du niveau de la mer... Les
ambivalences et les contradictions s’emparèrent de moi pour tenter de mettre
de l’ordre dans les pensées qui s’imposaient à moi... J’avais donné à Paris
deux mois auparavant à une maison d’édition un manuscrit d’un texte intitulé
« Lettre ouverte à l’Occident » traité par le plus grand mépris car
les vérités qu’il contenait n’étaient pas dicibles en Europe... Ce texte était
« né » dès octobre 2000, avait été amendé après les Sommet de Gênes
et celui de Durban qui n’avait pas été soulevé car le livre était parti avant
la tenue de cette dernière rencontre sur le racisme. Il ne faudra jamais
oublier que le sommet de Durban en Afrique du Sud s’est tenu quelques jours
seulement avant le 11 septembre 2001... Je me
retrouvais en situation de révolte, de découragement et de questionnements
assez insolubles. Ayant vécu l’impérieuse loi des éditions occidentales et
les positions des journalistes les plus en vue en France concernant ce qu’ils
attendaient que je leur dise, je me retrouvais vaincue une fois de plus par
la force de l’Occident et ma faiblesse à exprimer ce que je voulais dire non
seulement dans le monde arabo-musulman mais à l’Europe et à tous les
Occidentaux. J’ai dit non à tous les poncifs traînant par exemple dans toutes
les soi-disant études sur le monde arabe et musulman et concernant la vision
occidentale de la femme arabe, à tous les clichés en psychopathologie qui
veulent considérer l’hystérie comme la principale maladie psychique des
femmes arabo-musulmanes, à tous les schémas réducteurs qui empêchent
justement le tissage de liens différents mais égalitaires entre les mondes
orientaux et occidentaux. Mais mes propos
sont très difficiles à faire entendre pour le moment. Si Noam Chomsky (
« Cette Amérique qui n’apprend
rien » Le Monde, 22 novembre 2001p. VIII ) peut les écrire, c’est
parce qu’il est Américain et que cela lui donne la puissance, curieusement
même pour se dresser contre son propre pays. Moi, je suis trop faible, aussi
faible que le monde dont je proviens et dans lequel fut inventer la bombe
humaine, elle se fait se sauter car l’Occident refuse d’entendre ce que nous
avons tous à lui dire, Arabes, musulmans, intellectuels du tiers monde,
Américains du Sud, pauvres, opprimés, femmes tuées pour être nées à la
mauvaise place, vies laminées et détruites par l’absence de liberté et des
libertés dans nos pays qui ont horreur de la liberté. Comme exemple
on peut prendre mon ouvrage « Une psychiatrie moderne pour le
Maghreb » resté au fond d’un tiroir d’éditeur à Paris pendant plusieurs
années car le sujet n’intéresserait pas, d’après le responsable de
collection, les lecteurs français. On aurait voulu que je traite de l’hystérie
féminine au Maroc et au Maghreb... jusqu’à la mort du professeur de
psychiatrie Mustapha Boucebsi tué car propageant en Algérie des idées trop
modernistes. Faisant valoir que nous allions être tués jusqu’au dernier si
nos idées ne se propageaient pas, le livre a enfin été édité et doit sa
sortie à la mort de Boucebsi. Ainsi, on voit que les mauvaises qualités de la
compréhension entre les individus et les peuples ont opéré des désastres
d’abord dans les champs de la cognition, du savoir, de la culture, de la capacité
des intellectuels à établir des relations utiles et fécondes entre les
sociétés et les peuples. Ce lent travail
d’accumulation de la négligence des pays du nord vers les pays du sud a
provoqué la catastrophe du 11 septembre 2001, et c’est une catastrophe
anthropologique car elle n’a fait que se faire creuser un fossé plus
démentiel entre des cultures trop différentes qui ne trouveront peut être
plus les moyens humains du rapprochement. Huttington, Américain lui aussi, a
écrit un livre que les Occidentaux s’accordent à trouver remarquable,
« Le choc des cultures » Edward
Saïd, encore un Américain par l’adoption, Palestinien d’origine, en a fait
une critique remarquable ( in « Le Monde » octobre 2001 ) et ce
spécialiste de la relation entre l’Orient et l’Occident, nous fait
apercevoir, une fois de plus l’européo et l’américanocentrisme. On ne peut
négliger non plus son ouvrage fondamental paru en 1978 "
L ’Orientalisme, L’Orient vu par l’Occident ") un classique qui
abordait les impossibilités de rencontre entre engeances arabes et orientales
et Occidentaux attachés en premier lieu à rêver sur des créations
fantasmatiques sorties plus de leur imagination que de la réalité des
déserts, des oasis et des yeux noirs des femmes lascives dansant dans leurs sept
voiles. En général, les points de vue et les opinions des uns et des autres
sont radicalement différents voire opposés. Pour l’Occidental, je suis
Marocaine donc Orientale mais Maroc en arabe veut dire Occident, ponant,
couchant et je me vois affublée de qualificatifs aussi absurdes que si je
traitais une Portugaise de Lapone ou d’Ukrainienne blanche ! Cette cécité
des Occidentaux concernant les autres cultures est tout simplement un mépris
pour l’Autre et une indifférence dans les meilleurs cas. Connaissant six
langues uniquement parce que j’ai été colonisée et ayant appris la géographie
de la France à la place de celle de mon pays, le Siècle Classique au lieu des
oeuvres complètes de Jalal Dine Roumi ou de la grandeur des Abbassides,
sachant tout de l’Europe et des États-Unis, puis du monde grâce à cet
éclatement qui a fait que je ne pouvais rester bi-culturée seulement et
uniquement cela, ce n’était pas ou plus assez, j’ai investigué dans toutes
les cultures du monde. Et bien m’en a pris sous la férule du très grand
maître Georges Devereux, lui-même un déchiré entre les cultures comme moi :
Devereux était le créateur mondial de la discipline dite
« Ethnopsychiatrie » et de cela m’est resté un projet de
« re » connaissance de tous les Autres et une revendication
égalitariste entre tous les peuples et toutes les culturocivilisations, c’est
ainsi que je voudrais télescoper les deux concepts car une culture correspond
obligatoirement à une civilisation et réciproquement. Les cultures ne sont
pas univoques et les civilisations ne sont ni étanches ni parfaitement
isolées et autarciques. Quelque chose
entre les êtres humains a circulé d’un bout à l’autre de la planète et si
l’Amazonien et l’Aborigène semblent très différents voire autres, si le
cannibale et le Zoulou, le Pygmée et le Peuhl sont noyés dans la même
ignorance égalisatrice, ils ont à voir avec l’Indien des Plaines si cher à
Devereux, celui qui a été exterminé par les Américains pour qu’ils occupent
tout le sol mais surtout, surtout, circule en eux tous une âme humaine, la
même pour tout le monde. C’est le même Indien des Plaines qui a grimpé au
mépris de sa vie les hauteurs vertigineuses des deux tours du Wolrd Trade
Center pour les construire. Et Colin Powell oublie qu’il est noir et ne
s’embarrasse pas d’états d’âme pour décider, en consensus, de la mort des
« soft targets » ou cibles molles ou douces dans les « side
effects » ou effets latéraux de la guerre contre l’Afghanistan qui tue
des milliers de civils directement par les armes et des millions par la faim
et toutes les sortes de déprivation. Mais les anciens esclaves et opprimés ne
deviennent-ils pas les plus féroces oppresseurs, les plus zélés et les plus
déterminés ? Ce sont des processus psychologiques inconscients. Ceux qui
opèrent en madame Condoleeza Rice, conseillère de G. W Bush, elle qui avait
été victime des mesures d’ostracisme exercées contre les Noirs quand elle
était enfant. Sa mère la consolait en lui disant de rester à sa place mais de
travailler surtout pour devenir présidente des Etats-Unis, ce que la sage
petite fille fit et on connaît son extraordinaire réussite. Elle en a oublié
qu’elle fut aussi méprisée que les femmes arabes, que les femmes afghanes,
que les esclaves, ses ancêtres pas si lointains… L’Occident va
de mal en pis dans son « misunderstanding » ou
« mécompréhension » des autres s’il ne change radicalement
d’« entendement » des Autres, de tous les Autres. Que l’on ne s’y
trompe pas : aux États-Unis et en Europe, Oussama Ben Laden est un
terroriste, le terroriste le plus recherché de la planète. Mais aux yeux des
deux cent cinquante millions d’Arabes et du milliard deux cent millions de
musulmans, dans leur écrasante majorité, Ben Laden n’est pas un terroriste
mais le héros et le sauveur de la nation et du peuple arabo-musulman écrasé
par le racisme des pays riches, par le mépris des pays démocratiques, par la
majeure partie des individus qui peuplent le monde dit libre. Les Occidentaux l’ont porté au pouvoir de ce qu’ils appellent le
terrorisme quand les Américains l’armaient contre l’ex-U.R.S.S. pour la
chasser d’Afghanistan. Ils en ont fait un immense personnage contre lequel
toute la planète blanche et riche s’arme et de notre point de vue arabe et
musulman, nous avons beaucoup de pitié et de mépris vis-à-vis d’une coalition
contre un individu terré au fond de grottes et de cavernes qui fait trembler
le monde libre par sa seule volonté, paranoïaque. Ben
Laden, pour moi, femme arabe, ne peut être porteur de projets de société
valables s’il arrivait même à anéantir tout l’Occident. Je refuse de vivre
comme moitié d’un être humain, dégradée et anéantie par les hommes de ma
propre engeance. Ce projet de déchéance de la femme est principalement
agissant dans la cosmogonie anthropologique de Oussama Ben Laden qui ne craint
d’épouser une enfant quand bien même c’est son père, le mollah Omar, que la
lui a offerte et réciproquement, il offre sa fille, une enfant, au même
mollah Omar créant des cercles d’inceste, d’homophilie et de pédophilie entre
eux que personne n’a seulement songé à expliquer et divulguer. Ces
filles de quinze ou seize ans ont continué à payer pour l’aberration des
hommes arabes et musulmans qui ne conçoivent leurs rapports aux femmes que
dans une intégrale domination des femmes par les hommes ; cela doit changer
et si des fous furieux comme Ben Laden prennent le pouvoir, cela en est fait
de la nation arabe et musulmane pendant des siècles. Les Arabes et les
musulmans pensent que l’évolution de la condition des femmes n’est qu’une
errance de type occidental et une aventure impulsée par le colonialisme qui
doit s’arrêter pour que les femmes retournent sous le voile, dans la maison,
sous la tutelle de tous les hommes, de la famille, de la société et de
l’état. Il ne faut pas
oublier et, un monsieur comme George W. Bush est inapte à le comprendre, (
Ses conseillers ignorent superbement l’arabe comme langue, la
culturocivilisation arabo-mususlmane comme un système tout juste bon
autrefois à faire des films hollywoodiens dans lesquels des Américaines brunes
dansent lascivement les fameuses danses des sept voiles…) Oussama Ben Laden a
créé une idéologie et un système de pensée et de comportements qui lui
survivra. Les Arabes et les musulmans tragiquement révélés à leur misère et à
leur insatisfaction ont appris à se suicider en se transformant en bombes
humaines et kamikazes capables de se jeter dans n’importe quelle aventure en
harmonie avec leurs croyances. Il y a
aujourd’hui dans le monde arabo-mususlman une série de Ben Laden car
l’Occident a tué Mahdî Ben Barka, Marocain, Patrice Lumumba, Congolais,
Machel Samoa, Mozambicain, Hamilcar Cabral, de Guinée-Bissau, Sira Wiwa,
Nigérian, Che Guevara, Colombien, Salvador Allende, Chilien, tous gauchistes
qui rêvaient d’un monde plus vrai, plus juste, plus égalitaire entre les
hommes et les femmes sur toute la planète. Ils ont été
tués car l’Europe et les États-Unis avaient peur du réveil des peuples et
leurs leaders les plus adéquats ont été éliminés un par un tandis que les
tyrans, les dictateurs, les satrapes et les personnages les plus corrompus se
sont arrogés les pays, les gens, les richesses et le pouvoir de vie et de
mort sur les êtres les plus courageux et les plus à même de sauver
humainement leurs contrées et une idée juste du monde et de la vie. G d’Estaing
donnait du « mon cousin » à l’horrible Jean Bedel Bokassa, et Papa
Doc martyrisait Haïti avec sa milice Les Tontons Macoutes sous les yeux des
Américains et à leur porte... tandis que son fils, le repoussant Baby Doc est
toujours réfugié en France. Ces mêmes « puissances » et c’est ainsi
qu’elles se revendiquent, ont causé la mort de 11 millions d’Africains entre
le 15 et le 19° siècles dans l’horrible absurdité de l’esclavage pour onze
millions de déportés de plus, les ancêtres de ceux que l’on nomme aujourd’hui
les Afro-Américains. Pour que la justice soit faite et que tout soit dit, un
jour, il ne faut pas oublier que les Arabes aussi, furent de rudes négriers.
Les génocides se sont faits avec la complicité de l’Amérique dont le
président Clinton est allé présenter des excuses pour le génocide du Rwanda
qu’il a délibérément laissé faire, 900 000 à deux millions de morts, d’avril
à juin 1994. Mais l’Occident n’a pas demandé pardon à l’Afrique au Sommet de
Durban pour l’esclavage car il ne voulait rien payer, ce qui aurait pu se
produire s’il reconnaissait l’atrocité des massacres et des traitements subis
par les Africains lors de la traite des Noirs. Les Occidentaux
ont privilégié les royaumes les plus pourris de la création, en Péninsule
Arabique, et ces mêmes chantres de la démocratie et du progrès humain
traitent avec la famille des Al Sabah au Koweït qui possèdent ce pays,
gouvernent comme au moyen âge florentin sans l’esprit de la Renaissance et
sans l’art et le raffinement des cours italiennes, interdisant aux femmes de
voter et de se présenter aux élections. En somme des bêtes ou des serves. Ce sont ces fameux Al Sabah qui ont été défendus en 1990-91 lors de la
Guerre du Golfe, soi disant parce que ce pays –une petite excroissance
autrefois province de l’Irak-, dépecée par les Anglais quand ils occupaient
la région et faisaient ce qu’ils voulaient, était un état souverain et
inviolable. Ben Laden
exècre ces pays et a juré leur ruine et on est obligé de se rendre à
l’évidence : il a raison. Mais là où le
bât blesse cruellement, c’est que, ce qu’il préconise à la suite de la chute
éventuelle de ces pays, c’est pire, peut être. Asservissement complet des
femmes, réaction fasciste musulmane d’extrême droite, inhibition,
interdiction de l’art et de la culture émancipationniste et libertaire ou
libératoire. Ceci est un résultat tragique de l’histoire depuis un siècle ou
deux pour la cuturocivilisation arabo-musulmane. Tous nos
espoirs de vie meilleure ses sont effondrés avec le 11 septembre 2001 car
nous serons pris en étau entre l’Occident qui n’a que la réaction du corps
blessé, celle de se défendre par tous les moyens, qui va ignorer les
exigences et les nécessités du tiers monde et spécifiquement des Arabes et
des musulmans et l’incapacité des chefs arabes et musulmans de dicter une
politique démocratique et valable car ils ne se sont tous maintenus au
pouvoir que par le meurtre et la rapine depuis cinquante ans. Si les états
arabes et musulmans s’affilient à la tendance internationale dominante et à
la ligne de conduite des instances onusiennes, les Arabes et les musulmans,
dans leur immense majorité, ne sont pas d’accord avec leurs dirigeants et
vivent avec un narcissisme blessé et une personnalité amoindrie et
dévalorisée à travers l’histoire, à travers les aberrations de l’histoire
récente depuis les luttes d’indépendance et les libérations factices des pays
du tiers monde totalement dominés économiquement par les pays riches et
puissants. Les périodes de
colonisation sont prolongées par le fait de la guerre toujours perdue de la
Palestine contre Israël et depuis la manière effroyable dont a été menée la
destruction systématique de l’Irak où Saddam Husseïn est vécu lui aussi comme
un héros et un grand de la nation arabe. Qui sait en Occident que Sabra et
Chatila sont deux camps palestiniens où deux mille civils, en majeure partie
femmes et enfants ont été massacrés sans représailles par les
Israéliens ? Il faut le spécifier le lendemain de deux attentats qui
font trente morts en Israël, le 1° décembre 2001, au grand dam de la
communauté internationale qui crie au scandale. Le problème
atroce est que la peau d’un Noir, d’un Arabe ou d’un musulman ce n’est rien,
ça ne vaut rien, même pas un papier dans la presse avec la rubrique des
chiens écrasés. Deux bombes humaines se sont encore sacrifiées pour faire
entendre au monde le drame du peuple palestinien. Le calcul des morts de la
deuxième Intifada donne, pour une année, deux cents morts israéliens pour
huit cents palestiniens. Les chiffres parlent seuls ; on oublie aussi
que cette seconde Intifada, « La Guerre des Pierres » a débuté
quand un enfant palestinien a été tiré comme un canard par les soldats
israéliens… L’acharnement
de l’Amérique à détruire l’Irak, par ailleurs, est immonde et effroyable. Cette
destruction massive a été justifiée par une désinformation absolue des masses
occidentales et des instances aptes à défendre des causes justes. Encore une
fois l’Irak n’est pas ce que la propagande américaine a voulu nous faire
croire à travers C.N.N. et ses affabulations. C’était l’état
arabe le plus avancé, le plus laïc, le plus nanti en chances de progrès.
L’Irak a fait la guerre avec l’Iran à la place de tous les états arabes de la
région en raison d’une haine légendaire entre Arabes et Persans et pour des
problèmes actuels d’hégémonie, de main mise sur les lieux saints de l’islam
par la seule Arabie saoudite, de pétrole et de relations avec l’Occident que
l’Iran islamiste a appelé le Grand Satan. Quand la guerre fut finie, millions
de morts, les payements promis pas les royaumes arabes ne furent pas faits à
l’Irak qui avait supporté seule l’effort de guerre. On sait la suite. C’est
un règlement de compte entre Arabes dans lequel les U.S.A. ont mis le nez
pour des raisons économiques et de pétrole, parce que l’Irak était au bord de
la fabrication de la bombe nucléaire, parce que le niveau scientifique du
pays était très avancé pour un pays arabe et menaçait Israël, parce que les
Arabes ne peuvent être aux yeux des Occidentaux que ceux qui donnent leur
pétrole, encaissent quelques dollars par baril et se taisent en laissant
leurs capitaux ainsi volés à la nation arabe et musulmane fructifier en
Occident. Aux
dernières nouvelles, les magnats et nababs arabes sont en train de faire fuir
leurs capitaux vers... la Suisse qui se frotte les mains. Les Américains ont
cru bon de confisquer les avoirs de tout le monde arabe en arguant de masses
d’argent servant à la structuration du terrorisme. Ils oublient seulement le
terrorisme des états du Golfe Arabique sur leurs populations et l’état qui y
est fait aux femmes, cet état monstrueux dont tout le monde se moque, au
fond. Nous
contestons, nous Arabes libres, que l’argent du pétrole et des recettes du
pèlerinage à la Mecque ne soit pas redistribué entre tous les Arabes et le
musulmans. Si ! Les Saoudiens, très généreux, envoient les dépouilles
des moutons sacrifiés par deux ou trois millions de pèlerins pendant
l’accomplissement de leurs rites aux pauvres d’entre les pauvres, au Bengla
Desh et au Pakistan. Certains
trésors de guerre de nos pays sont gelés par la mort des leaders qui
partaient faire ce qu’ils voulaient en Occident et sont décédés en emportant
en eux les chiffres des combinaisons des comptes suisses comme certains
hommes d’affaires maghrébins et arabes qui n’avaient pas prévu les cancers et
les crises cardiaques et ont laissé des trésors au Panama et dans les paradis
fiscaux du monde entier, en fait l’argent de la nation arabe et musulmane.
Nous réclamons ces sommes colossales pour bâtir nos hôpitaux , lycées et
universités, stades et maisons de jeunes, crèches et orphelinats, maison de
la jeunesse et jardins publics, musées et aéroports, laboratoires de
recherche, observatoires d’astrophysique –il n’y en a pas un seul pour
l’immense territoire arabo musulman, ports et maternités, pour électrifier
nos campagnes et dessaler l’eau de mer pour l’immensité aride de nos vingt et
un pays arabes ou pour la centaine de pays musulmans… Ces éléments de
la réalité ne sont ici rapportés que pour expliquer ce que les Occidentaux
ignorent et ne veulent même pas comprendre pour que les choses changent dans
le monde. Le 11 septembre
c’est l’instauration à jamais de la Croisade entre musulmans et Occidentaux
comme lors des siècles que l’on croyait finis dans leurs haines et leur
agressivité. Les millions d’innocents qui meurent en Afghanistan et en Irak -
qui sait en Occident qu’un million d’enfants irakiens est mort en dix ans des
bombardements massifs de tout le pays, de faim, de maladies, d’absence de
soins car tout manque et surtout les médicaments ? - les millions d’Africains
qui n’ont pas de quoi soigner les vingt huit millions de sidéens d’entre eux,
les laissés pour compte de toute la planète ne peuvent qu’entrer en guerre
contre le gendarme du monde, cette Amérique arrogante qui dans une autre
position paranoïaque ne comprend pas que l’on puisse la haïr ? Chelsea Clinton est très triste de savoir que l’on hait l’Amérique et n’a
pas pensé, pauvre petite fille riche, étudiante en Angleterre où elle a fait
sa déclaration, qu’elle a bénéficié dans son enfance de deux mandats de son
père et a vécu les meilleures conditions au monde qu’un enfant puisse avoir
entre dix et dix-huit ans. Pendant ce temps qu’elle a passé à la Maison
Blanche combien de petites filles ont été excisées, combien ont été
légalement violées à son âge dans le mariage le plus légal, combien sont
mortes fautes de soins, de nourriture, de tendresse et de confort ? Son
père n’a reconnu que quatre après qu’il est le responsable du génocide du Rwanda
et a demandé pardon comme si demander pardon allait ressusciter un ou deux
millions de morts ? Ces drames ont
amené des intellectuels comme moi à désespérer de l’Occident et de leurs pays
dans une attitude de repli et de suicide scientifique et idéique sachant que
rien ne peut changer, les uns nous ignorant ou cherchant à acheter nos
capacités et les autres, les nôtres, tuant en nous jusqu’à la volonté de
créer encore et de s’exprimer. Pour ma part, je demande justice tant à mon
pays et à ma civilisation qu’à l’Occident pour le fait que je n’utiliserai
chez moi que le dixième de ce que j’ai consenti à apprendre : il s’agit
d’un meurtre commis sur ma Personne, sur mes possibilités, sur mes désirs,
sur mon Etre philosophique, sur mon sexe saccagé en terre d’islam. Cette
tuerie commise sur moi, qui suis un être libre et inviolable au même titre
que tout individu arrivé sur la terre, est un scandale affreux et
aujourd’hui, je ne peux plus le taire et je redoute en même temps que la
revue SUD/NORD qui m’a demandé à deux reprises, la deuxième fois, à la suite
de mon hésitation dûe à l’humeur pessimiste et aux éléments précédemment
évoqués, ne soit d’accord pour livrer in extenso ce que j’ai écrit. Cela ne
serait qu’habituel entre l’Occident et moi… mais l’heure est grave. Le drame est
cette haine forcenée que les Américains sont arrivés à faire naître chez les
Arabes et les musulmans : il n’y a aucun espoir aujourd’hui d’une quelconque
possibilité de rapports d’estime et d’amitié entre Arabes et Américains. C’est une
horreur de le dire et c’est une horreur que cela existe. Les tiers mondistes
ne veulent pas des Américains, de leur civilisation qui gagne partout et de
leur désir de régenter le monde. Arabes et musulmans sont en train de
démontrer qu’ils sont les seuls capables de se dresser contre l’hégémonie
américaine avec les moyens du faible et du pauvre contre le riche et le
puissant. Les Occidentaux
doivent redouter que les futurs Oussama, ( le prénom se donne à une infinité
de petits garçons qui viennent au monde ! et en arabe il signifie « Le
Lion » -qui le sait en Occident ?-) que les futurs rebelles, donc, ne
réussissent là où Ben Laden risque d’échouer. Il n’a pas échoué à entrer dans
l’histoire. La radicalisation de l’islam politique dans le monde y compris en
Occident (cinq millions de musulmans en France, l’Angleterre base de l’action
islamique dans le monde, les Noirs américains, Black Muslims...) conduira à
l’édification d’une énorme nation musulmane, un milliard et deux cents
millions d’individus, à un projet de société en complète opposition avec le
monde occidental. Ses valeurs, ses buts, ses méthodes sont radicalement opposés à ceux des
pays chrétiens, riches et prospères. La bombe atomique de la nation musulmane
c’est le ventre de leurs femmes qui repeuplent l’Occident et lui donne les
bras dont l’économie a besoin pour continuer à être prospère. Travaillant en
Italie dans le monde de l’émigration, je peux déjà dire que l’autre bombe
c’est la présence des migrants en Occident et, il ne faut pas s’y tromper,
les descendants de ces gens qui ont quitté la pauvreté, l’absence de
démocratie, l’esclavage déguisé, ne sont pas plus bêtes que d’autres. Leurs
enfants produiront aussi des génies, des chercheurs, des savants, des
artistes, des personnalités de renom. Il faut redouter que la blessure très
profonde de leur être ne se transforme en ce que les Occidentaux appellent le
terrorisme basé sur tous les sentiments de frustration qui le déclenche et
l’explique. Ceux-là font partie de l’Occident sur sa terre. Moi, je me
demande où va cette humanité si elle se complaît dans la haine et le mépris.
On est là pour l’instant. La solution est l’aisance du monde arabe et
musulman, aisance matérielle, morale, et humaine et on en est très très loin.
Il faut vivre dans la peur que la radicalisation ne continue encore. Je suis celle
qui dit à l’Occident : les bombes humaines ont aussi des mères qui
crèvent de chagrin quand leurs fils explosent. Je suis celle qui dit :
la solution n’est plus entre les mains des politiques du monde entier. Elles
est entre les circonvolutions cérébrales des penseurs, des philosophes, des
psychiatres, psychanalystes, écrivains et poètes. Personne ne les écoute. Le désespoir
est celui des penseurs, philosophes, psychiatres, psychanalystes, écrivains
et poètes du tiers monde auxquels leurs collègues occidentaux n’ont pas donné
la main pour sauver l’humanité, démolie dans les tours de ses désirs et de
ses idéaux. Ces désirs et
ces idéaux sont sous les gravats et sous les décombres des tours jumelles
américaines et des taudis d’Afghanistan, sous les tentes des camps
palestiniens dressées depuis cinquante ans où vivent ceux qui n’ont plus de
terre et de maisons, sous mon crâne livré au vertige des injustices provocant
des révoltes impuissantes, à la vindicte des tyrans et des dictateurs qui ont
fait de ma nation un champ de détresse sans lendemain qui chante ! Qui des Occidentaux sait que nous ne vivons
pas et encore moins, nous les femmes, les sacrifiées des sacrifiés… |
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